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23 mai 2012 3 23 /05 /mai /2012 09:16

Après de longs mois d’observation, le président du Mouvement Ivoirien des Consommateurs Organisés et Méthodiques (MICOM) a décidé d’interpeller le gouvernement sur les conditions de vie des Ivoiriens. Il explique dans cette interview en quoi le gouvernement est responsable de la souffrance des consommateurs et propose des solutions. "On ne peut pas cacher le soleil avec la main. Rien n'a évolué. Les gens ont accusé Laurent Gbagbo (…) Mais Laurent Gbagbo est parti, la crise s'est accentuée, la pauvreté s'est accentuée et la situation des consommateurs a empiré", accuse-t-il.


La  vie n’est pas du tout rose pour les consommateurs. Selon vous, que faut-il faire pour soulager les Ivoiriens ?


Pour  prendre des mesures adéquates sur la cherté de la vie, il est inapproprié de s’enfermer dans ses bureaux dorés pour agir. Il faut dans le cadre du consumérisme connaître les vrais acteurs. C'est-à-dire les commerçants et les associations de consommateurs qui sont sur le terrain. C’est un préalable à toute action régalienne qui se veut efficace. Hélas, nous sommes au regret de constater que tous les ministres du Commerce qui se succèdent adoptent curieusement la même attitude. C’est bien dommage.
 
Mais pourquoi insistez-vous sur le fait que le gouvernement doit discuter avec vous alors que ce sont les commerçants qui paraissent être ses interlocuteurs directs ? 


A première vue, nous sommes d’accord avec vous, surtout si nous nous mettons dans la peau du citoyen lambda. Et pourtant, notre rôle dans ce problème national est plus qu’essentiel. Voyez-vous, les commerçants qui sont sur la place sont des gens très puissants. Ils font donc la sourde oreille à chaque fois qu’ils sont mis à l’index quant à leur responsabilité dans la cherté de la vie. Il n’y a qu’une synergie entre le gouvernement et les vraies associations de consommateurs qui peut faire plier les commerçants.
 
Insinuez-vous que votre milieu serait infesté aussi par de fausses associations ? 


C’est un secret de polichinelle. Nous constatons depuis belle lurette que les différents gouvernements ont une tendance à s’acoquiner avec des associations fantoches qui s’affublent frauduleusement du titre d’associations de consommateurs. Ce sont ces pseudos associations qui ont droit de cité à la télévision. Et pourtant, elles ne sont même pas capables de réagir et d’agir dans un cadre institutionnel. Nous constatons qu’il suffit qu’elles se fassent établir un récépissé dans des conditions qui prêtent à débat pour se répandre ici et là. Nous, au MICOM, nous sommes une association légalement constituée et nous figurons dans le journal officiel de la Côte d’Ivoire. Cherchez les associations qui y figurent et vous comprendrez notre récrimination. Des ministres préfèrent ces gens malléables qui sont sans métier reconnu et les incrustent dans les différents Conseils d’administration au nom des consommateurs.
 
Quel est  donc le jugement du président du MICOM sur la situation des consommateurs un an après le changement au sommet de l’Etat ? 


On ne peut cacher le soleil d’une main. Rien n’a évolué. Les gens avaient accusé Laurent Gbagbo, hier, de ne rien faire pour le peuple, en tout cas pour les consommateurs. La seule évolution notable, c’est la libre circulation des biens et des personnes. Mais Laurent Gbagbo est parti, la crise s’est accentuée, la pauvreté s’est accentuée et la situation des consommateurs a empiré. Au demeurant, nous constatons l’éclosion d’une nouvelle génération de riches. Il n’y a aucun changement notable. Les gens ont trop vite fait de rêver. Pourtant, nous avions été les premiers, pour ne pas dire l’unique association de consommateurs, qui a appelé les Ivoiriens à se calmer parce que ce gouvernement venait d’arriver. Mais ceux qui doivent discuter avec nous ne viennent pas.
 
Le gouvernement justifie son inaction par la crise post- électorale. N’a-t-il pas raison ? 

 
Ceux qui ont dit que Gbagbo avait créé une situation de désordre sont tout de même là depuis un an. Donc qu’ils agissent. Qu’on arrête de tourner autour du pot et de distraire le peuple ivoirien qui est plus que mature après toutes ces années de crise ! Pour baisser le coût de la vie, il y a une seule et unique décision à prendre au lieu d’enlever 10 FCFA ou 25 FCFA sur le sac de riz. Cette mesure est une insulte au peuple ivoirien qui souffre depuis des années. Que le gouvernement prenne une fois pour toutes ses responsabilités.
 
En faisant quoi exactement ? 


En agissant sur les coûts des produits pétroliers. On n’a pas besoin de sortir des cuisses de Jupiter pour le savoir et l’appliquer. Les ministres ne le savent que trop. En ce sens que dans l’opposition, ils avaient le même point de vue que nous. Comment se fait-il aujourd’hui qu’ils aient oublié nos revendications communes sur les prix des produits pétroliers ? Le gouvernement doit prendre ses responsabilités pour diminuer les prix. En 2007, lorsque le carburant était à 107 dollars, on était ici à environ 550 F, le gasoil. La flambée est partie de là. Mais il est arrivé que le baril soit à 80 dollars mais rien n’a changé ici. Aujourd’hui, il se situe autour de 104 dollars et les prix ne bougent pas.  Pourquoi ? Qu’on arrête de nous infantiliser. En faisant cette action, le gouvernement aura les coudées franches pour menacer les commerçants qui prétexteront  du coût du transport pour augmenter les prix des denrées. Sinon se borner à des actions dérisoires et chimériques est une fuite en avant. En outre, le gouvernement devra revoir sa politique de taxation. Parce qu’à dire vrai aussi, les taxes sont la deuxième cause de l’inflation sur les marchés ivoiriens. Trop de taxes tuent le peuple. Sous Gbagbo, le Port autonome d’Abidjan parvenait à faire entrer plus de 20 Mille tonnes de marchandises. Nous en sommes à 16 mille aujourd’hui. Ce n’est pas la faute des dirigeants actuels du Port qui abattent un énorme travail mais cela est dû aux taxes qui font fuir les investisseurs.
 
Entre autres raisons, le gouvernement actuel n’est-il pas lié par son orientation  économique ultralibérale ? 


Je ne le conçois pas forcément sous ce prisme puisque bien qu’étant des libéraux, les dirigeants actuels savent très bien qu’un dispositif légal leur permet d’influencer positivement sur les prix des denrées de première nécessité. A moins que le ministre du Commerce ignore cette loi de 1991 sur la concurrence. Il suffit de diminuer les taxes sur les produits de première nécessité dont les produits pétroliers et tout diminue par un effet boule de neige. Sous Gbagbo, lorsque vous garez votre véhicule dans une station service, c’est au moins 10 FCFA qui vous étaient prélevé pour les Forces de défense et de sécurité. Nous avons critiqué ce fait avec ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui puisque l’armée jouit déjà de certaines prérogatives. Aujourd’hui encore ces 10 Fcfa sont prélevés. Pourquoi, alors que les Fds n’existent plus. Il ne faut pas perpétuer ce qu’on a reproché au pouvoir Gbagbo. Donc nous estimons que l’orientation économique du gouvernement actuel ne peut justifier qu’il ne puisse baisser les taxes.
 
Quelles discussions le MICOM a avec les syndicats de transporteurs qui semblent s’accommoder des prix du carburant que vous dénoncez ? 


En ce moment, les transporteurs ne sont pas contents mais quand ils se plaignent, des personnes malintentionnées interprètent leurs complaintes comme des projets de déstabilisation de l’Etat. Ce n’est pas normal. Comment ne pas donner du grain à moudre à ceux qui disent que certains transporteurs étaient manipulés par des hommes politiques. Parce qu’on ne peut pas avoir fait la grève sous Gbagbo et se taire alors que ce pour quoi on a manifesté n’a pas changé d’un iota. Pour ma part, j’insiste sur les menaces que subissent les transporteurs qui veulent protester, menaces qui les obligent à se taire. Au MICOM, nous projetons de rencontrer les transporteurs et ensemble décider d’une grande manifestation en vue d’obtenir une diminution du prix du carburant. Nous comptons y associer les femmes du vivrier qui éprouvent d’énormes difficultés à aller chercher les denrées alimentaires à l’intérieur du pays. Comment se fait-il que le prix du riz varie de Korhogo à Abidjan. Au surplus, nous entendons relancer la lutte contre le racket qui n’est pas mort en dépit des mesures prises.
 
Ah bon ? 


Mais oui, nous affirmons haut et fort que le racket n’a pas disparu. Nous savons que la cellule mise en place et dirigée par un ex-ministre abat un travail colossal qui a considérablement réduit les effets du racket. Aujourd’hui la libre circulation commence à devenir tangible. Cependant des enquêtes de terrain ont révélé que le racket a pris une autre forme plus fine avec une sorte de consentement mutuelle entre chauffeurs et agents des forces de l’ordre. Or tant que ce phénomène existera sous quelque forme que ce soit, le vivrier coutera cher puisque les femmes qui vont en brousse répercuteront leurs charges sur les denrées de première nécessité. C’est pour quoi nous demandons que cette cellule soit directement rattachée à la Présidence de la république afin qu’elle jouisse d’une autonomie beaucoup plus grande.
 
Comment jugez-vous les actions de terrain menées par certains membres du gouvernement et surtout le Premier ministre Ahoussou Jeannot ? 


Quand des responsables de premier plan en arrivent à mettre en scène leur déplacement, c’est à des spectacles pareils qu’on assiste. C’est révoltant parce qu’infantilisant. Nous au MICOM, nous n’avons pas attendu d’être nommé pour parcourir les marchés et nous imprégner des souffrances de nos populations. Nous connaissons les prix que nous communiquons régulièrement aux pouvoirs publics. Les promenades gouvernementales ne nous font ni chaud ni froid. On n’a pas besoin de cortège et klaxons pour aller demander le prix de la viande à l’abattoir. Le Premier ministre a tous les leviers étatiques en main pour avoir les prix sur les marchés et pour agir sur ceux-ci.
 
Est-ce qu’avec le nouveau gouvernement, vous maintenez votre revendication consistant à l’organisation d’un audit des fonds générés par le pétrole ? 


Tout à fait, et nous insistons sur ce fait puisque nous ne pouvons faire deux poids deux mesures. Ce que nous avons revendiqué sous Gbagbo n’a pas été satisfait, donc nous le poursuivons encore. Il a été établi que la gestion de la manne pétrolière par l’ancien régime laissait à désirer puisque du pétrole sortait illégalement de la Côte d’Ivoire. Ça fait un an que  d’autres personnes gèrent ce secteur, il serait bienséant qu’elles viennent nous dire ce qu’elles font. Si tant est que l’on veut se présenter sous de nouveaux habits, cet audit doit être fait et les résultats mis à la disposition du peuple.  Il existe trop de choses louches autour du président Ouattara. Il faut que cela cesse.
 
Vous affirmez qu’Alassane Ouattara serait pris en otage ? 


En tout cas, ç’en a tout l’air. Parce qu’occupé à remettre la Côte d’Ivoire sur les rails, il n’a pas forcément le temps nécessaire de contrôler tous ces hommes d’affaires nouveaux qui ont remplacé ceux qui étaient décriés sous Gbagbo. Nous disons qu’il se peut qu’il soit l’otage d’une frange de ses collaborateurs. Aujourd’hui certains de ses ministres se comportent comme des roitelets qui, avec un orgueil narquois, se moquent des revendications légitimes des consommateurs. Nous allons bientôt demander une audience au chef de l’Etat pour lui donner directement les noms de ces ministres qui rament à contre courant des aspirations du peuple.
 
Où en êtes-vous avec vos revendications contre la CIE ?


 
Nous en sommes au point de départ, c'est-à-dire que la CIE continue de faire la sourde oreille face à nos revendications, convaincue qu’elle a le soutien des pouvoirs publics qui ont abandonné le peuple à la merci d’une entreprise négrière et je pèse mes mots. Depuis 2007, le MICOM  est à la pointe du combat pour la révision de la convention de concession qui lie la CIE à l’Etat ivoirien. Parce que cette entreprise qui ne se préoccupe que de ses gains sans s’occuper de ses devoirs envers le peuple, en a trop fait. Nous avons déjà dit que ce combat est un sacerdoce et que nous le mènerons au péril de notre vie. Donc nous allons reprendre notre bâton de pèlerin et partir à l’assaut  de ce monstre qui semble effrayer les pouvoirs publics depuis Bédié jusqu’aujourd’hui. Si nous nous sommes arrêtés un peu, c’est pour fouetter l’orgueil des Ivoiriens qui se préoccupent plus de leurs partis politiques que de leur propre survie.

 

Nous avons observé et maintenant que la grogne se généralise contre la CIE et ses méthodes cavalières, nous allons agir. Nous allons utiliser des moyens inédits contre les agents de la CIE et cela fera date, croyez moi. Nous demandons au gouvernement, à défaut de reprendre en main ce pan important de notre souveraineté nationale,  de faire jouer la concurrence. Comment une entreprise peut-elle faire la pluie et le beau temps sans que le gouvernement ne réagisse. Après toutes ces années de crise, elle ose encore faire pression sur certaines populations qui sont sans un sou afin que celles-ci payent des factures qui avoisinent le million souvent.  Que le gouvernement écoute parce qu’un jour, l’implosion sociale pourrait venir de l’arrogance de la CIE.  Nous demandons au Chef de l’Etat de mettre enfin en place son gouvernement de technocrates à son image. Afin que nous ayons des interlocuteurs qui ont le  B-A= Ba de ce que  c’est  qu’un cadre institutionnel et qui ont un bagage intellectuel. Nous souhaitons que ceux qui ont des affinités politiques avec lui soient ramené à son cabinet pour laisser la place à ceux qui peuvent véritablement l’aider à satisfaire le peuple.
 
Réalisée par Saint-Claver Oula

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