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13 septembre 2011 2 13 /09 /septembre /2011 03:04

On a souvent tendance à les oublier. Et pourtant, d’illustres personnalités proches de Laurent Gbagbo sont incarcérées à la prison de Katiola. Un journaliste les a rencontrés. Récit d’un moment d’intense émotion.


Katiola, 400 km au nord d’Abidjan, il est un peu plus de 16h en ce jour du mois de septembre. Nous sommes devant la maison d’arrêt et de correction de la ville. Dans un quartier aux allures anciennes. Une piste villageoise bordée de hautes herbes conduit à un bâtiment vétuste. C’est la prison civile de Katiola. Celle qui accueille depuis quelques semaines d’illustres pensionnaires. Des personnalités proches de Laurent Gbagbo, président de la République de Côte d’Ivoire renversé le 11 avril 2011. Une couche récente de peinture cache mal son état de vétusté. Son mur est surmonté de barbelés tout aussi récents. Il est haut d’environ 6 mètres. A l’entrée de la cour, un puits. Des jeunes filles y prennent de l’eau. En rigolant. La cour est envahie par des herbes récalcitrantes. Visiblement, elles n’ont pas été coupées depuis plusieurs jours.


Les consignes ici sont draconiennes. Les visites strictement contrôlées. Elles nécessitent une autorisation en haut lieu. Un concours de circonstances nous ouvre cependant les portes hermétiques de la maison d’arrêt et de correction de Katiola. A l’intérieur, assis sous le préau, les célèbres prisonniers de la crise postélectorale. Jean-Jacques Béchio, président du parti « Pour la Côte d’Ivoire » ; Mme Bro-Grébé, présidente des femmes patriotes ; l’ambassadeur Koné Boubacar, ex-directeur du protocole. Kuyo Téa Narcisse, ex-chef de cabinet de Laurent Gbagbo et ex-président de l’Africa sport d’Abidjan (club omnisports) est en conversation dans une pièce attenante.


A notre vue, Jean-Jacques Béchio, tel un gamin, laisse éclater sa joie. Il bondit dans nos bras. Sans retenue. Il faut surtout éviter d’écraser une larme. Malgré l’émotion. Jean-Jacques Béchio a les cheveux coupés ras. La tête est toute blanche. Mais il affiche un visage gai. Il est visiblement en excellente santé. A ses côtés, l’ancienne ministre des Sports, présidente des femmes Patriotes, Généviève Bro-Grébé. Un pantalon bleu court jusqu’aux genoux, un tee-shirt blanc, les cheveux fortement blanchis, coupe récente. Elle est digne dans sa posture. Elle est radieuse. Resplendissante de santé. « Comment ça va à Abidjan ? », s’informe-t-elle. « Ici, ça va. Le moral est haut. Je suis en vacances à Katiola. Pendant dix ans, j’ai organisé des marches, des meetings. Sans repos. Je me repose à Katiola », dit-elle, à la fois pour se rassurer et pour cacher sa gêne d’être là, entre les quatre murs de la prison de Katiola.

 

Juste derrière elle, installé dans un fauteuil artisanal, barbe d’une semaine sel-poivre, l’ex-directeur du protocole d’Etat, Koné Boubacar. Devant lui, une pile de publications de la presse nationale du jour. Il dévore les journaux ou presque, distrait par moments, par notre regard fuyant et larmoyant.


L’ex-chef de cabinet à la présidence de la République, Kuyo Téa Narcisse est également détenu à Katiola. Lui aussi respire la grande forme. Seul l’ancien ministre et ex-inspecteur général d’Etat, Sangaré Aboudramane, détenu également à la maison d’arrêt et de correction de Katiola, manquait à l’appel. « Il se repose », selon ses codétenus.


Chacun d’eux a vécu ce court moment de retrouvailles avec une rare intensité doublée d’une vive émotion. Comme si un faisceau de lumière illuminait leur existence dans cet univers carcéral, spécialement aménagé pour eux. « Ils sont bien gardés. Ils sont bien nourris. L’Etat assure leur restauration », tente de rassurer une source proche du gouvernement de M. Ouattara, présente dans la ville et qui semble.


Tous les détenus de Katiola sont des proches collaborateurs de l’ex-président, Laurent Gbagbo. Ils ont été arrêtés le 11 avril 2011 suite à l’épilogue douloureux de la crise postélectorale. Ils sont aujourd’hui inculpés par la justice ivoirienne de divers délits allant de la rébellion à des crimes économiques et attendent d’être jugés.


La visite est brève. Tout au plus trois quarts d’heure. Mais pour toutes les personnalités internées dans le centre-nord de la Côte d’Ivoire depuis le mois d’avril 2011, elle a brisé la glace de l’isolement.

Une correspondance particulière de Dogoni Fofana  

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